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Critiques

Puisqu’on l’a fait nous-mêmes, on maîtrise tout. Bien sûr, il y a quand même quelques détails qu’on n’avait pas prévus du tout. On verra demain… Demain est un autre jour. Ils dorment, c’est très bien. Ils ne savent pas tout… C’est mieux aussi. Oui le directeur a raison, on ne peut pas tout dire.

Les Etats-Unis n’ont pas gagné deux guerres mondiales pour que l’humanité puisse cultiver en toute sécurité des légumes bios.*

Bruno Latour est connu pour son engagement en faveur de la lutte contre le changement climatique. J’étais curieuse, donc, en commençant la lecture audio pièce de théâtre, un peu méfiante aussi, craignant quelque chose de trop unidirectionnel, un discours un peu prêchi-prêcha. Mais il n’en est rien.
Cosmocolosse est, sous forme condensée et métaphorique, une histoire de l’idée du changement climatique : comment elle est apparue, comment les scientifiques se sont positionnés par rapport à ce nouvel objet scientifique, comment les politiques s’en sont emparés, pour agir (ou ne pas agir pour être plus exact), pour produire des éléments de langage. Et aussi comment le « grand public » a navigué entre ces discours, hésitant, mouvant, indécis et impuissant tout en même temps.
C’est à la fois caricatural, dense et complexe. Il faudrait lire et relire ce texte pour en comprendre tous les détails, tous les sous-entendus, toutes les métaphores. Il y a là matière à cogiter pendant de nombreuses heures, en contemplant les étoiles que l’on aperçoit encore à travers la couche de pollution.
Mais étrangement, à l’issue de cette lecture audio, le sentiment qui prédomine chez moi est celui de l’impuissance. Nous sommes appelés à disparaître, et après tout, ce n’est peut-être pas plus mal, en tout cas la Terre, Gaïa, s’en remettra. Alors, pourquoi, au lieu de faire des essais que l’on sait dérisoires, pourquoi ne pas en profiter au maximum, quitte à polluer un peu plus, car après tout, après moi le déluge, et c’est bien le cas de le dire.
Je ne crois pas que ce soit le message que Bruno Latour désire faire passer avec cette pièce, et pourtant c’est celui que j’ai reçu. Une sorte de sursaut citoyen me fait rejeter cette attitude, même si au fond je sais bien que mes efforts ne sont pas assez, et que, seuls, ils sont dérisoires. Mais il importe aussi de pouvoir se regarder dans la glace le matin, et de ne pas avoir tout à fait honte de ce que l’on y voit.
Etrange pièce, donc, d’un ardent porte-parole du changement climatique et de la nécessité d’agir, qui me laisse l’impression que toute action est et sera vaine. Je ne sais si je me méprends totalement dans mon appréciation ou si la pièce de théâtre n’est pas un reflet efficace de la pensée de son auteur. C’est donc un sentiment d’étonnement et d’incrédulité qui me restent à la fin de cette lecture, intéressante certes, mais qui pousse trop à mon goût à l’attentisme.

* La citation est amusante sortie de son contexte, j’ai beaucoup souri avec cette phrase. Mais, derrière la boutade, c’est aussi la réalité économique qui se cache derrière les guerres qui est exprimée et c’est une phrase d’un cynisme bien sombre qui, là, ferrait plutôt verser une larme sur les ressorts qui font bouger notre monde, qu’il soit question des Etats-Unis ou d’autres pays.
 
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raton-liseur | Mar 20, 2019 |
Pollution des rivières, embryons congelés, virus du sida, trou d’ozone, robots à capteurs… Comment comprendre ces « objets » étranges qui envahissent notre monde ? Relèvent-ils de la nature ou de la culture ? Jusqu’ici, les choses étaient simples : aux scientifiques la gestion de la nature, aux politiques celle de la société. Mais ce traditionnel partage des tâches est impuissant à rendre compte de la prolifération des « hybrides ». D’où le sentiment d’effroi qu’ils procurent, et que ne parviennent pas à apaiser les philosophes contemporains. Et si nous avions fait fausse route ? En fait, notre société « moderne » n’a jamais fonctionné conformément au grand partage qui fonde son système de représentation du monde : celui qui oppose radicalement la nature d’un côté, la culture de l’autre. Dans la pratique, les modernes n’ont cessé de créer des objets hybrides, qui relèvent de l’une comme de l’autre, et qu’ils se refusent à penser. Nous n’avons donc jamais été vraiment modernes, et c’est ce paradigme fondateur qu’il nous faut remettre en cause aujourd’hui pour comprendre notre monde. Traduit dans plus de vingt langues, cet ouvrage, en modifiant de fond en comble la répartition traditionnelle entre la nature au singulier et les cultures au pluriel, a depuis sa parution profondé-ment renouvelé les débats en anthropologie. En offrant une alternative au postmodernisme, il a ouvert de nouveaux champs d’investigation et, avec son « Parlement des choses », offert à l’écologie de nouvelles possibilités politiques.
 
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ReseauTransition | 6 autres critiques | Oct 6, 2016 |
Passionnant de l'excellent Bruno Latour dont le présentation du texte est très bien construite. Ce livre renouvelle de manière originale la notion de public et la participation démocratique. A relire et à méditer.
 
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bibliobsession | Aug 29, 2009 |
Intéressant mais frustrant. Les démonstrations de l'auteur me semblent vraiment manquer de clarté et de rigueur, ce qui est d'autant plus énervant que j'ai l'impression que ses théories sont plutôt pertinentes. Malheureusement je manque de la culture qui me permettrait de remplir tous les non-dits du bouquin et de comprendre vraiment ce qu'il raconte.

J'aurais préféré que l'auteur se concentre moins sur le style, qui est en effet attrayant et plein d'humour, et étaye ses affirmations par plus de faits. Il se contente souvent de répéter, en les reformulant légèrement, les mêmes affirmations. Cela permet de les comprendre un peu mieux, mais ne prouve pas qu'elles soient exactes. Même les schémas ne sont pas clairs ! J'en retire l'impression qu'on essaie de me jeter de la poudre aux yeux, ce qui est assez agaçant.
 
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FlorenceArt | 6 autres critiques | May 30, 2007 |