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Œuvres de Ovidie

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Nom canonique
Ovidie
Nom légal
Becht, Eloise
Date de naissance
1980-08-25
Sexe
female
Nationalité
Frankreich
France
Lieu de naissance
Lille, Frankreich

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Critiques

Si Mallarmé savait ça…

Ce texte n’est « ni un essai ni un manifeste […] tout au plus un exutoire […] une série d’uppercuts ».
C’est un texte de fureur, écrit avec une violence « par laquelle il faut passer pour trouver l’apaisement », selon les propres mots de l’autrice en introduction.
Après avoir travaillé quelques temps dans l’industrie porno quand elle était étudiante, s’être évertuée – comme la quasi-totalité des femmes hétérosexuelles – à plaire aux hommes avec un zèle inouï et mortifère qu’Ovidie qualifie de « servitude volontaire », elle a décidé il y a quelques années d’arrêter le sexe avec les hommes, alors qu’elle n’avait que 38 ans.
Dans le milieu de l’industrie du sexe, on la surnommait « L’intello du porno », ce qui lui fait dire : « quel malaise quand on y pense, tout le monde avait l’air de trouver extraordinaire qu’on puisse baiser et penser à la fois, preuve décidément qu’une femme doit choisir son camp entre accepter d’être réduite à sa corporéité et produire du discours, qu’elle ne peut être objet et sujet à la fois ».
Pourquoi avoir arrêté d’avoir des rapports sexuels avec les hommes ?
Par lassitude, par ennui, par dégoût, par colère – noire, accumulée – d’avoir reçu si peu en retour et de s’être fourvoyée. A l’entendre vitupérer à ce point, il est bien possible que ce soit à elle qu’elle en veut le plus : « J’en veux aux hommes autant qu’à moi d’avoir participé à ce jeu de dupes ».
Cette grève sexuelle n’a pas été décidée un beau matin mais s’est imposée progressivement, explique-t-elle. Elle précise qu’elle n’en fait ni un projet de vie ni un combat politique, que ça s’est juste imposé.
Le langage est cru (très cru), insolent, péremptoire, excessif à dessein, souvent très drôle, et fait mouche :
« Me masturber en pensant aux hommes, je trouve que c’est encore leur faire trop d’honneur. »
« Les bonnes sœurs sont des féministes qui s’ignorent, elles ont compris la sororité avant tout le monde. »
Avec une mauvaise foi assumée en essentialisant la nature et le comportement des hommes, elle dégomme et étrille les « bitards » en s’en donnant à cœur joie.
Elle démonte et dissèque, avec beaucoup de lucidité et sans rien lâcher, le regard que l’on porte sur elle, en tant qu’ex-travailleuse du sexe et que l’on ne manquera pas de porter sur elle face au récit de sa conversion. Elle trace toutes les pistes, mâchonne et triture toutes les critiques imaginables à venir, en plaquant déjà à terre ses futurs détracteurs.
« Non, je ne suis pas frigide. À vrai dire, je jouis même avec une déconcertante facilité, on m’a littéralement décerné un trophée pour cette capacité à jouir sur commande. Parmi toutes les activités insolites auxquelles j’ai pu me prêter, j’ai participé à une expérimentation menée par des sexologues danois, une sorte de marathon de la masturbation, durant lequel j’ai atteint vingt-six fois l’orgasme en quatre heures, avant de déclarer forfait. »
Dans le dernier quart du livre, la guerrière tonitruante dévoile pourtant, non sans courage, ses doutes et sa vulnérabilité, l’absence de contacts physiques qui la fait terriblement souffrir. Elle trouve après tout que même ses chiens sont mieux traités qu’elle. Elle a conscience que l’amour se refuse à elle, tout en admettant son incompréhension et sa peur de ce « mécanisme ».
« Et l’amour dans tout ça ? Si ma grève du sexe a débuté il y a quatre ans, je dois admettre que ma grève de l’amour avait commencé auparavant. Oui, je crois à l’amour, mais pas nécessairement pour moi. C’est un mécanisme que je ne comprends pas et qui par conséquent m’effraie. À mon sens, l’amour ne répond à aucune logique, c’est un sentiment trop incontrôlable et dangereux. Encore qu’il serait intéressant de définir ce qu’on entend par « amour ».
Et si la crise que traverse Ovidie était tout simplement le résultat d’un chagrin d’amour jamais guéri ?
« Parce que je sais que la douleur du chagrin d’amour est si violente qu’elle peut nous plonger dans une détresse émotionnelle capable de nous couper toute envie de vivre, je préfère m’en méfier comme de la peste. Je le sais, je l’ai vécu une fois, avec le seul homme que j’aie aimé dans ma vie, que j’aime toujours, et qui m’aime toujours lui aussi, à sa manière, enfin je crois. »
Il faut lire ce drôle de texte rageur, à la fois drôle et poignant, qui propose encore une voix nouvelle dans le courant féministe, par une forme de radicalité mais non dénuée d’ambivalence.
L’écriture d’Ovidie n’a certes ni la frappe ni l’amplitude d’une Virginie Despentes qui ausculte la société comme personne mais ce petit « exutoire » mérite qu’on s’y intéresse ; car il a tout l’air de nous livrer un message précurseur sur l’évolution des relations hommes/femmes.
Ne pas oublier enfin de souligner que ce texte hyper punchy et plein d’humour est aussi libérateur… jouissif !
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Signalé
biche1968 | 1 autre critique | May 20, 2024 |
Comme quoi, on n’a pas tous la même adolescence… Ovidie a seulement quelques années de moins que moi, mais l’adolescence qu’elle décrit, pourtant celle d’une fille de fonctionnaires d’une banlieue pavillonnaire sans âme, n’est pas du tout la mienne. J’espérais, avec cette bande dessinée, mieux décrypter certaines choses de comment cela se passait hier. Cela a bien été le cas, mais le propos est peut-être un peu trop superficiel et unidirectionnel pour véritablement me parler. L’aller-retour entre l’expérience de l’adolescence dans les années 90 et l’expérience d’être mère d’une adolescente aujourd’hui est elle aussi une bonne idée, mais à part exprimer des craintes, je ne suis pas sûre d’avoir trouvé dans ce livre beaucoup de pistes de réflexion pour m’aider à mieux assumer ce rôle.
En définitive, je me dis que ce livre ne m’étais peut-être pas destiné. Pour aborder pour la première fois ces questions, peut-être a-t-il du bon, mais si on a déjà commencé à y réfléchir un peu, ce livre semble un peu trop effleurer son sujet pour être utile. Il semble plus comme une étape dans une réflexion qui n’est pas encore mûre (sur la façon d’être mère aujourd’hui) ou dans la mise à nu de certaines blessures qui ne sont pas encore tout à fait guéries ou qui n’ont pas encore été complètement soignées. Un livre qui me laisse un peu comme au milieu du gué, il me faudra trouver d’autres occasions de côtoyer cette autrice pour achever la traversée.
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1 voter
Signalé
raton-liseur | Feb 24, 2024 |
Ovidie est en grève depuis 4 ans, l’occasion d’un bilan et de crier. Le besoin de tout mettre sur la table pour voir s’il est possible d’en tirer quelque chose, s’il est possible de redémarrer… pour aller où ?

Ovidie est en grève du sexe avec les hommes, donc.

Constat d’une grosse déception avec le sexe avec les hommes. Jeu de dupes dans une société patriarcale co-entretenu tant par les hommes (au mieux incompétents et au pire abuseurs (voir pire encore)) que par des femmes atteintes d’un syndrome de Stockholm.

Une triste chair portée par une grosse colère qui vise juste et s’apaise au fil du livre pour arriver à une fin très touchante.

Oui… hélas !

Un essai qu’on ne peut refermer sans se poser la question (quelque genre ou sexe que l’on soit). Et moi ?
… et fuir la absolument la réponse : non, moi, jamais !
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Signalé
noid.ch | 1 autre critique | Jul 3, 2023 |
Un essai sans complaisance par une auteur qui maîtrise le sujet. Un regard critique sur le monde du porn et ses dérives, l’arrivée des tubes et leur totale impunité, les conditions du milieu de cette industrie, les messages véhiculés, les dérives sociétales et, finalement l’impact sur la jeunesse et les ados.

Dans ce panorama, Ovidie cherche des solutions et propose un dialogue non moralisateur et vertueux pour tenter de préserver les plus fragiles.

Un livre à mettre entre toutes les mains !… (plus d'informations)
 
Signalé
noid.ch | Feb 21, 2022 |

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