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Chargement... Frida Kahlo par Frida Kahlo : Lettres 1922-1954par Frida Kahlo
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Opter pour la sélectivité aurait servi l'agrément de la lecture sans pour autant sacrifier la compréhension de la personnalité et de l'univers de cette femme hors norme, marquée par un destin brisé par la maladie, un style artistique très singulier, un engagement politique, une capacité d'amour et d'indignation peu commune.
Et une réelle capacité à émouvoir; impossible de ne pas être touché par la sincérité, la force et la fidélité de ses sentiments, par son attachement à ceux qu'elle aime et à son pays, par ses combats incessants face à des maux physiques rares, violents et souvent insolubles. Frida vibre de tout son être et partage sans compter.
Il faut dire que l'on trouve aussi de belles lettres et même de réelles pépites dans cette correspondance restituée chronologiquement, dans toute sa diversité et son caractère très inégal.
La lettre qu'elle adresse à Alejandro Gómez Arias -son amour de jeunesse qui se trouve à ses côtés lors de ce cruel accident de bus qui aura les répercussions que l'on connaît sur la vie de Frida Kahlo- en fait partie :
"Pourquoi tu étudies autant? Quels secrets cherches-tu? La vie te le révélera sans crier gare. Moi, je sais déjà tout, sans lire ni écrire. Il y a peu, quelques jours à peine, j'étais une petite fille qui marchait dans un monde de couleurs, de formes dures et tangibles. Tout n'était que mystère, tout cachait quelque chose; déchiffrer, apprendre, c'était un jeu plaisant. Si tu savais comme c'est terrible de tout savoir soudain, comme si un éclair avait illuminé la terre. A présent, j'habite une planète douloureuse, transparente, comme de glace, mais qui ne cache rien; c'est comme si j'avais compris en quelques secondes, d'un coup d'un seul. Mes amies, mes copines d'école sont devenues femmes petit à petit; moi, j'ai vieilli en quelques instants. Aujourd'hui, tout est mou et lucide. Je sais qu'il n'y a rien derrière, sinon je le verrais."
Elle a 19 ans quand elle écrit ces mots.
Parmi les longues plaintes dues à son état de santé, ses prières pour qu'on lui écrive et qu'on ne l'oublie pas, les manifestations de mauvaise humeur, les mots de détestation (pour les "gringos", les Français, les surréalistes et bien d'autres), les formidables flots de tendresse, il y a les mots incandescents, d'amour fou et inconditionnel pour Diego Rivera. C'est à la fois troublant et magnifique. Il n'y pas de limites à l'admiration qu'elle lui porte et il n'y a rien qu'elle ne saurait lui pardonner (et pourtant!). Elle l'aime comme un enfant, un père, un ami, un frère, un amant. Elle s'adresse souvent à lui en le nommant "mon enfant adoré" et s'inquiète du moindre de ses maux comme la plus abusive des mères.
Elle ne s'aime pas suffisamment pour ne pas se laisser habiter et dévorer tout entière par Diego; ainsi, dans la lettre qu'elle lui envoie en 1948 :
"Comme toujours, quand je m'éloigne de toi, j'emporte dans mes entrailles ton monde et ta vie, et de cela je ne peux me remettre.
Ne sois pas triste -peins et vis-
Je t'adore de toute ma vie..."
Le portrait qu'elle dresse de lui -dans la dernière partie du livre- est d'une grande beauté dans sa capacité inouïe à capter l'amplitude et la complexité de l'autre.
En voici un extrait :
"Comme les cactus de sa terre, il grandit fort et prodigieux, dans le sable comme sur la pierre; il fleurit d'un rouge vif, d'un blanc transparent et d'un jaune solaire; couvert d'épines, il garde au fond de lui sa tendresse; il vit avec sa sève puissante dans un milieu féroce; il illumine, solitaire, tel un soleil vengeur sur le gris de la pierre; ses racines vivent même quand on l'arrache à la terre, dépassant l'angoisse de la solitude et de la tristesse et de toutes les faiblesses qui en ont fait ployer d'autres. Il se soulève avec une force surprenante, et comme nulle autre plante il fleurit et donne des fruits."
Qui ne rêverait pas d'être l'objet d'un amour aussi généreux, aussi puissant... et aveugle? ( )