> LE SURRÉALISME, de Yvonne Duplessis. — Le livre d’Y. Duplessis : “le surréalisme” vient d’être réédité dans la collection Que Sais-je. Ce livre clair, bien, documenté, facile à lire, nous permet, dans un premier temps, de saisir les enjeux de ce mouvement puis il nous entraînera dans une réflexion sur la démarche elle-même.
Y. Duplessis nous rappelle que la poésie surréaliste avait pour objet d’explorer l’inconscient, que le poète surréaliste, descendant du romantisme, de Rimbaud, est un inspiré qui attend la révélation. Cet état d’esprit se retrouve aussi chez le peintre, son double. La technique est pour lui moins importante que l’inspiration : Picabia, avec des confettis, sur une toile, fait des fleurs, avec des macaronis, des troncs d’arbre. Le sens sera donné à des objets détournés de leur aspect utilitaire par l’imagination de l’artiste visionnaire. Il s’agit d’une entreprise dirigée contre la raison où l’image, comme le mot, naît d’un abandon à l’automatisme qui révélera l’irrationnel. Nous assistons à la naissance d’un art hallucinatoire. Tout cela, bien expliqué, campé à grands traits, donne une base solide pour aller plus loin, lire les ouvrages sur lesquels s’appuie l’auteur.
Les contours de la démarche sont assez flous si l’on se réfère aux artistes qui l’ont fréquentée. La plupart n’ont fait qu’y passer. Tout devient plus net si l’on s’appuie sur Breton qui, lui, dans ses ouvrages, ses manifestes, en situe les limites, les espoirs. Dans le troisième chapitre, Y. Duplessis tente de les situer en les reliant à ce qui les entourait. Elle ratisse large puisqu’elle nous ramène aux Romantiques et à Bergson. Nous la suivons moins quand elle inclut dans la démarche “le grand jeu” qui avait une dimension mystique que n’avait pas le surréalisme, ou Artaud qui fut certes avec Breton d’octobre 24 à décembre 26, mais dont l’essence de l’œuvre est beaucoup plus tournée vers l’infini.
Il ressort clairement de l’analyse d’Y. Duplessis que le surréalisme a eu trois étapes : celle qu’elle nomme “Lautréamont”, étape poétique, puis le Freudisme et le Marxisme. Ainsi, ayant cherché à s’évader au-delà du conventionnel et du rationnel, parti à la rencontre du hasard, il débouche sur une méthode. Il est clair dans ce livre que le surréalisme se voudra utile, voudra refondre la société, refaire l’homme. Sa rencontre avec le socialisme n’est pas fortuite. En 1930 la revue “La révolution surréaliste” fondée en 1923, deviendra “Le surréalisme au service de la révolution”. Il y a eu entre Breton qui se veut anti idéaliste et Marx un pacte que l’auteur semble expliquer, peut être excuser, par les bonnes intentions de Breton “C’est dans l’amour du prochain que réside la puissance de la régénération du monde” dit celui-ci (p. 118).
Ce livre donne à réfléchir, nous sort des commentaires qui tournent en rond dans l’histoire de l’art. Le surréalisme est ici centré sur son aspect “métaphysique”, psychique et social. Y. Duplessis pose la question à son niveau le plus intéressant, car à travers ce petit ouvrage on s’aperçoit que l’art ne concerne pas l’art, mais la vie. Ed. PUF - Que sais-je ?, 1991
—3e millénaire, (22), Hiver 1991

> Yvonne Duplessis étudie depuis plus de douze ans la vision dermo-optique ; elle a déjà publié, sur ce sujet, l'ouvrage “Les Couleurs visibles et non-visibles” (Éd du Rocher, 1984) et plus récemment “une science nouvelle : la dermo-optique” (Éd. du Rocher, 1996).