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Death of a Salesman par Arthur Miller
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Death of a Salesman (original 1948; édition 2000)

par Arthur Miller (Auteur)

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12,179116522 (3.64)264
The Pulitzer Prize-winning tragedy of a salesman's deferred American dream   Ever since it was first performed in 1949, Death of a Salesman has been recognized as a milestone of the American theater. In the person of Willy Loman, the aging, failing salesman who makes his living riding on a smile and a shoeshine, Arthur Miller redefined the tragic hero as a man whose dreams are at once insupportably vast and dangerously insubstantial. He has given us a figure whose name has become a symbol for a kind of majestic grandiosity--and a play that compresses epic extremes of humor and anguish, promise and loss, between the four walls of an American living room. "By common consent, this is one of the finest dramas in the whole range of the American theater." --Brooks Atkinson, The New York Times "So simple, central, and terrible that the run of playwrights would neither care nor dare to attempt it." --Time… (plus d'informations)
Membre:brakketh
Titre:Death of a Salesman
Auteurs:Arthur Miller (Auteur)
Info:Penguin Classics (2000), Edition: 01, 128 pages
Collections:Votre bibliothèque
Évaluation:****1/2
Mots-clés:ROOTs2021, play

Information sur l'oeuvre

Mort d'un commis voyageur par Arthur Miller (1948)

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http://cultureetsciencessociales.blogspot.com/2010/07/arthur-miller-mort-dun-com...

Arthur Miller – Mort d’un commis voyageur (1949)

Mort d’un commis voyageur ; autopsie du rêve américain. Dans cette pièce en deux actes, publiée en 1949, Arthur Miller dresse un portrait désabusé de l’american way of life. A travers la descente aux enfers du représentant de commerce Willy Loman, Miller écorne les valeurs fondamentales de la société américaine – ambition, réussite individuelle, système marchand, concurrence et capitalisme. Proche de son dernier voyage, Willy Loman s’interroge sur le sens de la vie. Le rêve de réussite individuelle sur laquelle il a bâti sa propre vie et celle de ses enfants n’est-il qu’un miroir aux alouettes ?

Vendre des blocs de glace à des esquimaux
Willy Loman, la soixantaine, est un commis voyageur. Représentant de commerce. Ce qu’il vend, on ne le saura guère – indice de l’inutilité sociale de ce métier. Miller utilise ici la figure du commis voyageur pour illustrer l’absurdité fondamentale du système capitaliste. L’objectif final n’est pas de répondre à des besoins sociaux préexistants, mais d’en créer de nouveaux dans la population. Le but étant de produire toujours plus, il faut réussir à vendre pour écouler la production. Ainsi, le commis voyageur arpente les routes pour vendre des produits à des populations qui n’en ont pas – encore – ressenti le besoin. Aujourd’hui supplanté par la publicité ou le marketing, le commis voyageur met à nu la logique même du système marchand.

Le métier de commis voyageur permet également de mettre en lumière le caractère méritocratique du rêve américain. Parti de rien, n’importe qui peut faire fortune dans cette profession. La réussite individuelle est à portée de main, à condition de disposer de suffisamment de bagou et de personnalité. Ainsi, le représentant qui réussit peut gravir les échelons de la hiérarchie sociale, s’enrichir et participer pleinement à la société de consommation. Willy Loman est un de ces millions de travailleurs américains à croire fermement en sa bonne étoile. Son ascension sociale est proche ; même si, aujourd’hui, la voiture est vieille et abimée, achetée à crédit et les traites difficiles à payer. L’important est d’y croire.

« Quand le rêve brisé du vieux devient le pire cauchemar du jeune rêveur »
Le ressort tragique de la pièce repose sur le déclassement, la chute sociale. Dans la famille Loman, le déclassement est double : celui du père, Willy, dont la situation professionnelle se dégrade jusqu’au licenciement ; celui du fils, Biff, qui n’arrive pas à atteindre le statut social de son père et qui alterne entre petits boulots et chômage.

Willy Loman est un homme épuisé. Broyé, non pas par l’âge. Abimé, non pas par les maladies. Mais usé jusqu’à la moelle par son travail, ses trajets incessants sur les routes, ses nuits dans des hôtels poisseux. Plusieurs éléments dévoilent son intense fatigue psychique. En pleine conversation, il perd le fil et se met à discuter avec des fantômes surgis du passé – ceci constitue d’ailleurs une des belles trouvailles formelles de cette pièce, la coexistence du présent et du passé à travers les songes de Willy. De même, au volant de sa voiture, il perd souvent sa concentration, s’égare et provoque des accidents. Willy Loman arrive à un moment de sa vie où il ne sait plus où il va.
« LINDA
Tu n’es pas malade ?
WILLY
Mort de fatigue. Je n’en peux plus, voilà ! Je n’en peux plus, Linda. »

Professionnellement, Willy vit une descente aux enfers. Willy a longtemps été un commis voyageur satisfaisant, capable de nourrir sa famille – même s’il a tendance à enjoliver sa situation lorsqu’il en parle à sa famille. Pourtant, avec l’âge, ses clients le boudent et se moquent de lui. Son employeur ne lui accorde plus sa confiance. Il lui enlève son salaire fixe et ne le rémunère qu’à la commission. Puis, lorsque Willy, fatigué des déplacements incessants, demande un poste à New York, son patron le met à la porte. Sans une hésitation. Après trente-quatre ans de services.
« HOWARD
J’ai des tas de gens à voir…
WILLY
Je vous parle de votre père. Et des promesses que nous avons échangées par-dessus ce même bureau. Ne me dites pas que vous avez des tas de gens à voir… J’ai passé trente-quatre ans dans cette maison, Howard, et voilà que je n’arrive même plus à payer mes primes d’assurances ? Un homme n’est pas un fruit, tout de même, où on mange l’intérieur et dont on jette la peau… ? »

Dans un pays où la réussite individuelle se mesure exclusivement par le travail, la vie de Willy Loman est assurément un échec. Son rêve de devenir un représentant de commerce respecté, entouré de nombreux amis parmi les clients et les collègues, est brisé. Plutôt que de vivre plus longtemps cette déchéance, Willy Loman mettra un terme à sa vie. Mort d’un commis voyageur. Ultime humiliation, à son enterrement, personne ne viendra.
« HAPPY
Je te défends de dire qu’il est fou.
BIFF
Il n’a aucun caractère, voilà le drame. Tu crois que Charley se conduirait comme ça… dans sa maison, qu’il vomirait dans tous les coins les petites ordures qu’il a dans la tête ?
HAPPY
Charley n’a jamais eu les mêmes ennuis que lui non plus.
BIFF
Il y a des gens qui ont des ennuis plus graves que ceux de Willy Loman, crois-moi ! J’en connais.
LINDA
Alors, prends Charley pour père, Biff, si tu peux. Si tu y arrives. Je ne dis pas que Willy Loman est un homme important. Il n’a jamais gagné beaucoup d’argent, son nom n’a jamais été en première page des journaux du soir. Il n’est pas l’être le plus extraordinaire qui ait jamais vécu. Il est un être humain, voilà tout. Il n’y a pas de raisons pour qu’on n’essaie pas un peu de l’aider. Tu l’as traité de fou…
BIFF
Mais je ne voulais pas.
LINDA
Il y a pas mal de gens qui pensent qu’il a perdu…l’équilibre… mais il ne faut pas être très malin pour comprendre la vérité. La vérité, c’est que c’est un homme épuisé. Voilà.
HAPPY
Absolument.
LINDA
Un homme sans importance a le droit d’être épuisé comme les autres, comme ceux qui bouleversent la face du monde d’un seul de leurs gestes. Voilà trente-six an qu’il travaille pour la même compagnie… trente-six ans en mars prochain… et, maintenant que le voilà vieux, on lui enlève son fixe. »

Willy Loman rêve également de gloire pour son fils ainé, Biff. Il rêve d’ascension sociale, bien sûr. D’abord d’une ascension par le sport, mais Biff n’a pas les notes suffisantes en mathématiques pour accéder à l’Université. Puis d’une ascension par le commerce, mais, là encore, ses rêves sont brisés car Biff ne comprend rien au monde des affaires. Biff Loman connaît également un déclassement honteux. Biff n’égale pas la position sociale de son père dans une société où la mobilité sociale ascendante est l’objectif ultime. Après son échec scolaire, il enchaîne les périodes de petits emplois et de chômage. Il a même passé quelques mois en prison. Face à ces épreuves, Biff opte pour une autre issue que son père. Plutôt que le suicide, l’exil. Exil géographique d’abord, en quittant New York. Exil idéologique surtout, avec un refus des valeurs de concurrence et de réussite individuelle. Biff veut s’échapper du monde qui a brisé sa famille.
« LINDA
Tu as l’intention de rester à la maison, cette fois-ci ?
BIFF
Je ne sais pas encore. J’ai envie de prendre le vent… de voir un peu comment ça tourne.
LINDA
Biff.. on ne peut pas, toute sa vie, attendre de voir comment ça tourne.
BIFF
Je ne peux pas me fixer, maman. Je ne peux pas arriver à me fixer.
LINDA
Mais les hommes ne sont pas des oiseaux, Biff, qui vont et viennent avec le printemps. »

« On ne veut pas être des gagnants, mais on n’acceptera jamais d’être des perdants »
Alors que son château de cartes s’écroule, Willy s’interroge sur son mode de vie. Ses certitudes s’ébranlent, sa vision du monde évolue. Inconsciemment, il hésite entre l’acceptation du système marchand et le refus de celui-ci. Pour de nombreux personnages de la pièce, le mode de vie américain constitue le meilleur des mondes ; c’est le cas du second fils Happy, du voisin Charley et de son fils Bernard et d’Howard le patron de Willy. En un sens, ces personnages sont les gagnants du rêve américain ; ils ont réussi. A l’opposé, Biff représente la contestation du modèle marchand. Il ne peut pas s’adapter à ce monde dans lequel il n’accepte ni les normes ni les valeurs dominantes. Willy Loman oscille entre ces deux visions antagonistes du monde. Avec ce tiraillement interne, Arthur Miller pose une question simple : que signifie réussir sa vie ?

A travers les personnages en conformité avec le mode de vie marchand, Arthur Miller peint les valeurs dominantes aux Etats-Unis dans les années cinquante. Ces personnages acceptent un système qui repose sur la concurrence, l’ambition et l’argent. Dans ce monde, la réussite individuelle se mesure avant tout par le statut professionnel. Ainsi, Charley et Howard sont patrons, Bernard est diplômé et à un « bon » emploi. A un autre niveau, le personnage du fils Happy illustre ce mode de vie marchand, dans son rapport aux filles. Son objectif ultime est d’enchainer les conquêtes. Dans la société de consommation, tout est destiné à être jeté et remplacé, y compris les conjoints. Souvent, Willy Loman se conforme à ce mode de vie. Les déboires qu’il connait avec sa voiture ou ses produits ménagers attestent de sa participation à la société de consommation. Par ailleurs, Willy inculque à ses enfants les valeurs sportives telles que la compétition, le travail sans relâche et la réussite individuelle. Le sport, comme version euphémisée de la compétition économique. Au-delà du sport, il souhaite que ses enfants réussissent, qu’ils atteignent la position sociale la plus élevée possible.
« WILLY
Oh ! mes enfants, vous vous donneriez un peu de mal… vous pourriez mettre le monde entier sur le cul… le monde entier. »

Happy, le fils cadet, a quelque peu hésité entre acceptation et refus du système marchand. A la fin de la pièce, il a choisi. Il poursuivra le combat, les rêves de gloire de son père. Pour réussir sa vie, il faut être en avant des autres.
« BIFF
Pourquoi ne veux-tu pas partir avec moi, toi ?
HAPPY
Parce que moi… je ne me laisse pas abattre aussi facilement, parce que moi, je reste dans cette ville de merde… et que je vais leur montrer qui je suis… Les frères Loman !
BIFF
Moi, je me suis regardé en face, tu vois…
HAPPY
Parfait. Seulement, moi, j’ai envie de te prouver et de prouver à tout le monde que Willy Loman n’est pas mort pour rien et que les rêves qu’il faisait étaient de bons rêves. Que ce sont même les seuls rêves qu’un homme puisse faire ! Il faut être le premier, il faut être en avant des autres. Voila pourquoi il s’est battu. Et moi, je vais réussir… pour lui. »

On le voit dans cet extrait, Biff se situe à l’opposé de cette vision du monde comme une compétition généralisée. Il a peu d’ambition, ne souhaite pas se hisser au-dessus de ses semblables. Pour lui, réussir sa vie, c’est vivre en harmonie avec ses proches, avec la nature, avec soi-même. Travailler dans une ferme par exemple.
« HAPPY
Est-ce que tu as de l’avenir là-bas ?
BIFF
Je ne sais pas ce que ça veut dire, l’avenir, Happy. Je ne sais pas moi-même ce que je veux, alors…
HAPPY
Je ne comprends pas…
BIFF
Tu vas comprendre. Depuis le collège, depuis six ou sept ans, j’ai essayé de me fabriquer un avenir. Expéditionnaire… commis voyageur… toutes sortes de bricoles. Tout cela est médiocre : le métro, le matin quand il fait beau dehors. Foutre toute une vie en l’air à faire des relevés, ou à téléphoner, ou à vendre, ou à acheter… En souffrir pendant cinquante semaines en pensant a deux malheureuses semaines de congé… Alors que tout ce qu’on désire vraiment, c’est d’être en plein air, et de tomber la veste… Et toujours d’être obligé d’enfoncer l’adversaire… C’est comme ça qu’on se fait un avenir, n’est-ce pas ?
HAPPY
Mais tu te plais au moins dans ta ferme ? Tu aimes ce genre de vie ?
BIFF
Happy… j’ai fait vingt ou trente métiers différents depuis que j’ai quitté la maison. Ca finit toujours de la même façon. J’ai toujours eu la ferme intention de ne pas perdre mon temps dans la vie. Chaque fois que je rentre à la maison, je réalise que je n’ai jamais fait que ça : perdre mon temps.»

Biff ne se reconnait pas dans le monde des affaires. Il n’en partage pas les valeurs dominantes. Il ne souhaite pas écraser ses adversaires, vendre un produit à ceux qui n’en ont ni le besoin ni les moyens, travailler comme une bête de somme et attendre patiemment les vacances. Lors d’une discussion de famille, il lâche un terrible « J’emmerde le monde des affaires ». En fin de discussion, son père lui rappelle l’impératif de la mobilité sociale ascendante. Pour réussir sa vie, il faut faire mieux que le grand-père.
« HAPPY
Seulement, je vais te dire… même que ça ne me fait pas plaisir de te le dire, mais je te le dis quand même : il y a pas mal de gens, dans le monde des affaires, qui pensent que tu es un petit peu fou.
BIFF
J’emmerde le monde des affaires.
HAPPY
Parfait… parfait ! Tu l’emmerdes… parfait… mais ne te coupe pas…
LINDA
Happy, je t’en prie…
BIFF
Je me fous de ce qu’ils pensent, tu vois ? Ils se sont moqués de papa pendant des années… tu tiens à savoir pourquoi ? Parce que nous ne trouvons pas notre place dans cette ville de louftingues. Nous devrions fabriquer du ciment en plein air… ou construire des toitures, et un charpentier, ça a le droit de siffler, en plus…
WILLY
Ton grand-père, déjà, était plus qu’un charpentier. »

A travers ces épreuves, Biff a gagné en lucidité et pris du recul sur lui-même. A plusieurs reprises, il affirme avoir compris qui il était. Il sait qu’il n’est rien. Mais, pour Biff, n’être rien n’est pas une honte. Au contraire. Dans un système perverti, n’être rien constitue déjà une petite victoire. L’échec est pour lui une preuve de réussite.
« BIFF
Papa, il y en a treize à la douzaine, des types comme moi, des types comme toi !
WILLY
Treize à la douzaine ! Je suis Willy Loman ! Et toi tu es Biff Loman, et je te défends…
BIFF
Je ne suis pas un chef… je ne suis pas un meneur d’hommes, Willy Loman ! Et toi non plus… Toi… tu es un type de rien du tout. Moi ? Je vaux un dollar de l’heure. »
WILLY
Tu crèves de mépris !
BIFF
Je ne suis rien, papa. Je ne suis rien. Tu ne veux pas comprendre ça, non ! Tu ne peux pas ? Il n’est pas question de mépris… Seulement je sais ce que je suis… »

« La seule chose qui compte en ce monde, c’est ce qu’on peut vendre, ce qui peut faire de l’argent… »
Pour Willy Loman, le refus du système n’est pas aussi conscient et revendiqué que pour son fils. Il a longtemps été partisan – et dupe en même temps – de ce système. Il continue à vouloir convaincre son fils Biff d’y réussir. Pourtant, ses certitudes chancèlent. Il ne maîtrise plus sa voiture ; il observe le paysage par la vitre, et s’émerveille de sa beauté ; il veut semer des fleurs et des légumes dans son jardin et rêve d’exil à la campagne, loin de la concurrence qui règne en ville.
« Willy
Emmurés… voilà ce que nous sommes… Emmurés. Briques et fenêtres… Fenêtres et briques.
LINDA
On aurait du acheter le terrain, à coté…
WILLY
Et la rue encombrée de voitures. Et pas un souffle d’air frais dans tout le quartier. Et le gazon qui ne pousse même plus. Pas même moyen de faire sortir une malheureuse carotte dans le jardin, derrière. Il faudrait faire une loi contre ces maisons à appartements. Tu te rappelles les ormes que nous avions là derrière… Nous y accrochions la balançoire, Biff et moi…
LINDA
On se serait cru à mille lieues de la ville… Oui…
WILLY
On aurait dû l’arrêter, l’entrepreneur qui les a abattus… Il a massacré cet endroit… Je revois ce temps-là, Linda. J’y repense chaque jour un peu plus. A cette époque-ci de l’année, on avait le lilas et la glycine. Après, les pivoines et les jonquilles… Ah Le parfum qu’il y avait dans cette chambre…
LINDA
Oui… Bah ! après tout… Il faut bien que les gens vivent quelque part.
Willy
Il y a trop de monde, voilà le malheur. Il y en a plus qu’avant.
LINDA
Ce n’est pas qu’il y en ait plus, mais…
WILLY
Il y en a plus. On crève de concurrence ! Et la puanteur qui vient de la maison là… tu la sens ? Et l’autre bloc, plus loin, et sa peste à lui… tu la sens ?... »

Willy s’aperçoit progressivement qu’il n’a jamais réellement intégré les valeurs du système capitaliste. A la logique froide du calcul rationnel et de l’argent, il a toujours préféré la chaleur des relations humaines. Pour Willy, c’est le style, la personnalité, qui comptent. La personne compte plus que le chiffre. A plusieurs reprises, Willy se moque de son voisin Charley et de son fils Bernard. A ses yeux, ils symbolisent la petite rationalité sans aucune grandeur. Charley est peut-être un bon commerçant, mais il n’a aucune personnalité. Bernard réussit mieux que Biff à l’école, mais il est mal aimé par ses camarades et se comporte comme un cloporte. Le seul personnage qui a réussi et que Willy respecte est son frère Ben. Ce dernier est parti à l’aventure en Afrique et a fait fortune avec des affaires mystérieuses. Sa personnalité explique son succès, bien plus que des petits calculs.
« WILLY
Ce n’est pas tellement ce qu’on dit qui compte… c’est la façon de le dire. C’est la personnalité qui l’emporte. »

Willy prend conscience que le monde dans lequel il vit a changé. La vision romantique des affaires, où les relations humaines sont intenses et chaudes, laisse la place à une rationalité de plus en plus anonyme. Le but est de faire de l’argent, du profit, et l’efficacité prime sur toute autre considération. Willy comprend qu’il n’est pas adapté à ce système, lui qui a toujours considéré commis voyageur comme un métier de relations. Il confesse à sa femme que ses clients ne le respectent plus parce qu’il parle trop et fait trop de plaisanteries. A l’opposé, les cloportes que sont Charley et Bernard ne plaisantent guère avec leurs clients, mais ils réussissent et sont respectés. La rationalité économique a asséché le monde. Willy ne se sent plus comme un poisson dans l’eau dans les eaux froides du calcul égoïste.
« WILLY
C’est comme ça. Mon père a passé des années en Alaska. C’était un homme aventureux… et, dans la famille, on n’avait pas froid aux yeux… Ce qui fait que je m’étais dit que j’irais peut-être bien avec mon frère ainé… pour essayer de retrouver le père et nous installer avec lui… Je m’étais presque décidé, quand j’ai fait la connaissance d’un voyageur de commerce dans un hôtel. Il s’appelait David Singleman. Il avait quatre-vingt-quatre ans et il avait trainé ses marchandises dans trente et un Etats. Il montait dans sa chambre le vieux Dave, je me rappelle très bien… il mettait de vieilles pantoufles de velours vert… Il décrochait le téléphone et, sans quitter sa chambre, rien qu’en appelant ses clients, il gagnait sa vie. Quand j’ai vu ça, j’ai compris que le métier de voyageur de commerce, c’était le plus beau métier qu’un homme puisse imaginer… Parce qu’enfin où pourrait-on trouver un métier où un homme de quatre-vingt-quatre ans connait dans vingt ou trente villes différentes des tas de gens qui l’aiment, qui l’aident, qui se souviennent de lui. D’ailleurs quand il mourut, le vieux Dave… et il eut vraiment la mort d’un commis voyageur, dans le wagon-fumoir du train de Boston, avec aux pieds ses pantoufles de velours vert… Quand il mourut, donc… il y avait des centaines de clients et de collègues à son enterrement. Et, pendant des mois après ça, il a fait mortel dans tous les trains. Dans le temps, on y mettait de la personnalité, Howard, on y mettait du respect, de la considération, de la camaraderie. De nos jours, tous ça s’est desséché. Il n’y a plus la moindre amitié à trouver nulle part. Comprenez-vous ce que je veux dire, au moins ? Plus personne ne me montre plus d’amitié dans la clientèle. On dirait que plus personne ne me connait. »

On retrouve cette opposition entre argent et relations humaines lorsque Willy se fait licencier. Willy travaillait pour le père d’Howard avant même la naissance de ce dernier. Willy a même conseillé son père dans le choix de son prénom. Ainsi, pour Willy, ce lien personnel le lie durablement à l’entreprise. Howard ne l’entend néanmoins pas de cette manière et il met à la porte Willy dès lors qu’il n’est plus assez productif. Le monde de Willy s’écroule. Arthur Miller livre ici la morale de sa pièce, par l’intermédiaire de Charley : lorsque la recherche de l’argent et de l’intérêt personnel guident les actions des hommes, les relations humaines perdent de leur consistance et la solidarité s’effrite.
« WILLY
Charley… Je suis à bout… à bout. Je ne sais plus à quel saint me vouer. Il m’a foutu dehors.
CHARLEY
Howard t’a foutu dehors ?
WILLY
Ce morveux !... Tu te rends compte… J’ai choisi son prénom, moi… C’est moi qui l’ai baptisé Howard…
CHARLEY
Mais ça ne signifie rien, tout ça, Willy… Rien du tout. Tu l’as baptisé Howard… c’est très bien, mais ça ne se monnaie pas… La seule chose qui compte en ce monde, c’est ce qu’on peut vendre, ce qui peut faire de l’argent… C’est marrant : toi, un voyageur de commerce, tu ne sais pas ça ?
WILLY
Je me suis toujours attaché à penser le contraire, voilà ! J’ai toujours cru que rien de mal ne pouvait arriver à un homme, quand il a de l’allure, que tout le monde l’aime…
CHARLEY
Tout le monde t’aime. Et alors ? A quoi ça te sert ? Tu t’imagines qu’on aime les milliardaires ? Tu crois qu’ils ont tous de l’allure ? On les foutrait tous dans un bain turc, il y en a la moitié qui aurait l’air de vendeurs de cochons ; seulement, quand ils sont habillés, avec leurs vêtements et des poches dans leurs vêtements, on les aime… sois tranquille. » ( )
  Babou_wk | Jul 16, 2010 |

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Miller, Arthurauteur principaltoutes les éditionsconfirmé
Boehlke, HenningConcepteur de la couvertureauteur secondairequelques éditionsconfirmé
Brown, John Masonauteur secondairequelques éditionsconfirmé
Bruck, Peterauteur secondairequelques éditionsconfirmé
Dukore, Bernard F.auteur secondairequelques éditionsconfirmé
Hawkins, Williamauteur secondairequelques éditionsconfirmé
Hirsch, Joseph ( Jacket Art )Illustrateurauteur secondairequelques éditionsconfirmé
Rau, Rudolph F.auteur secondairequelques éditionsconfirmé

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You don't understand: Willy was a salesman. And for a salesman, there is no rock bottom to the life... He's a man way out there in the blue, riding on a smile and a shoeshine. And when they start not smiling back - that's an earthquake.
He's liked, but he's not well liked.
Biff : Shouldn’t we do anything?

Linda : Oh, my dear, you should do a lot of things, but there’s nothing to do, so go to sleep.
Charley : Howard fired you?

Willy : That snotnose. Imagine that? I named him. I named him Howard.

Charley : Willy, when’re you gonna realize that them things don’t mean anything? You named him Howard, but you can’t sell that. The only thing you got in this world is what you can sell. And the funny thing is that you’re a salesman, and you don’t know that.

Willy : I’ve always tried to think otherwise, I guess. I always felt that if a man was impressive, and well liked, that nothing-

Charley : Why must everybody like you? Who liked J. P. Morgan? Was he impressive?...But with his pockets on he was very well liked.
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The Pulitzer Prize-winning tragedy of a salesman's deferred American dream   Ever since it was first performed in 1949, Death of a Salesman has been recognized as a milestone of the American theater. In the person of Willy Loman, the aging, failing salesman who makes his living riding on a smile and a shoeshine, Arthur Miller redefined the tragic hero as a man whose dreams are at once insupportably vast and dangerously insubstantial. He has given us a figure whose name has become a symbol for a kind of majestic grandiosity--and a play that compresses epic extremes of humor and anguish, promise and loss, between the four walls of an American living room. "By common consent, this is one of the finest dramas in the whole range of the American theater." --Brooks Atkinson, The New York Times "So simple, central, and terrible that the run of playwrights would neither care nor dare to attempt it." --Time

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