Avec Brisingr, Christopher Paolini apprend l'art de durer, et c'est assez réussi. Les deux premiers tomes montraient très clairement un manque de maturité dans l'écriture (surtout pour le premier), des sautes de logique, une très faible profondeur des protagonistes de l'histoire. Avec Brisingr, le rodage est achevé, la technique est là et Paolini a bien enrichi son histoire. L'action est plus complexe, dense, mieux suivie. L'auteur s'appesantit sur les personnages, leurs motivations réelles ou cachées. Nous suivons des histoires parallèles qui mettent de la pâte humaine (mariage de Roran, libération de Sloan), nous entrons dans la politique compliquée des nains. Cela ne nuit en rien à la qualité intrinsèque du récit, qui est de donner de l'action, mais cette action vient au bout d'un processus raisonné.

Nous suivons également à la trace les compléments de formation de dragonnier et la fin du roman est particulièrement riche avec les révélations apportées par Oromis et Glaedr non seulement sur la parenté d'Eragon, mais également sur la source de la puissance de Galbatorix. J'ai particulièrement été intéressé par la fabrication de la nouvelle épée et des propriétés enflammées qu'elle développe (réminiscence wagnérienne de la forge d'Alberich et de l'épée de Siefried ?).

Quelques regrets cependant. D'abord qu'il n'y ait pas à la fin un ressort dramatique plus puissant avec la tentative de création d'un nouvel Ombre, lequel aura fort peu existé. Ensuite que l'auteur a tendance à verser dans le "sanglant" lors des combats. Le roman n'en est pas infesté mais la description détaillée n'apporte rien à l'histoire. Enfin, qu'il y a encore "puérilités" disséminées dans le récit. Par exemple lorsque Saphira a des touffes de laine de mouton dans les gencives (cela n'apporte strictement rien), ou les quelques blagues puériles qui sont des tentatives tombant à plat dans le roman. Sans doute cela sera-t-il corrigé dans le prochain opus ?

Mise à part ces quelques remarques, ce livre se lit très facilement malgré son côté imposant : le sujet s'est densifié, la maturité est là. Assurément, Brisingr est le meilleur de la trilogie déjà parue. ( )