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La vie de voyage

par Conde de Gobineau

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Je n’imagine que ce que je vois : cette solitude morale, absolue, sans contraste, qui s’épaissit autour de nous… Peur ? Je n’ai pas peur ; ou, du moins, je n’ai pas précisément peur… mais, au premier abord, je ne voyais, je ne comprenais que la superficie des choses et l’apercevant comme elle est, bariolée et mouvante, je m’en amusais et ne supposais pas le dessous. Mais, maintenant, prends-tu garde toi-même que nous sommes entourés par l’inconnu, par l’étrangeté incommensurable, sans bornes ? Que tout ce que nous approchons, nous regarde comme nous le regardons nous-mêmes, et cela sans nous comprendre, comme aussi nous ne comprenons pas ? (…) Tiens ! (…) ce Kerbelay-Houssein, lui-même, dont nous célébrons l’honnêteté et la droiture, depuis que nous le connaissons, savons-nous bien ce que lui-même appelle droiture et honnêteté ? Qu’y a-t-il de commun entre ces gens-là et nous ? Eh bien ! oui, j’ai peur ! Je voudrais me retrouver dans un autre pays, dans le nôtre, dans celui que nous avons contemplé toute notre vie, qui n’a pas de mystère et d’inconnu pour nous ; pour lequel nous sommes faits, et qui est fait pour les natures que nous avons reçues du ciel ! Je voudrais voir les gens que nous pouvons reconnaître, sur le visage desquels nous sommes accoutumés à lire, et qui comprennent le bien et le mal de la même façon que nous ! Enfin, Valerio, oui, c’est vrai, je me sens perdue ici ; nous sommes tout seuls, et, j’en conviens, j’ai peur ! j’ai peur ! j’ai peur ! Je ne veux pas rester ici ! Allons-nous-en !

Tiré du recueil Nouvelles asiatiques, La Vie de voyage est plutôt un court roman, qui conte les tribulations d’un jeune couple parti à l’aventure sur les routes de Perse suite à un revers de fortune. Sans suivre une trame bien définie, Gobineau utilise ce prétexte pour compter de nombreuses anecdotes et décrire les paysages d’un pays sous le charme duquel il est manifestement tombé, puisqu’il y a lui-même séjourné longtemps. La plus grande partie du récit, même s’il est amené par une introduction un peu longue qui part d’Italie, suit une caravane aux confins de la Turquie, et l’on y apprend ce qui a conduit certains des membres de cette société temporaire à mettre ses pas dans ceux de Kerbelay-Houssein, le maître muletier. Des gens sans racine, des gens poussés par un certain amour du voyage, des gens tenus par des promesses ou des espoirs. Il y a un peu de tout, et Gobineau expose les motifs, les situations, sans prendre partie, comme un auteur jouissant de sa plume et de ses souvenirs, laissant le lecteur libre de faire l’usage qu’il veut de ces tranches de vie.

La fin du récit est quant à elle porteuse d’un message, assez ambivalent lorsque l’on sait que Gobineau a longtemps, en qualité de diplomate, vécut à l’étranger, notamment en Orient, et que, je cite l’article que lui consacre Wikipédia, ma seule source sur le personnage, qu’« il se fait « plus Persan que les Persans ». Sa maîtrise de la langue, sa remarquable adaptation à des conditions de vie très exotiques lui apportent l'estime de la population et des notabilités locales. (…) C'est néanmoins sans regrets que, rappelé, il quitte la cour de Perse en 1858. ». Lucie semble à l’image de l’auteur. D’abord fascinée, s’intégrant presque naturellement dans cette autre culture, elle se rend finalement compte qu’elle ne peut que rester à la surface des choses, qu’elle ne comprend en réalité rien à cette culture qui ne peut que lui échapper quelques soient les efforts et la bonne volonté qu’elle fasse. (Et parce que c’est une femme, cela la mène tout droit vers la crise de nerfs et elle ne peut que se laisser submerger par une angoisse qu’elle ne peut contrôler, mais cette nouvelle n’est pas le lieu d’un débat féministe…).
Je n’ai pas lu le fameux essai problématique de Gobineau, son Essai sur l’inégalité des races humaines qui aurait été une des sources d’inspiration des théories nazies et qui l’a fait tomber en disgrâce littéraire, et je ne suis pas non plus partisane de lire les œuvres à la lumière de la façon dont elles ont été utilisées par les générations passées, mais s’il n’est à aucun moment question de supériorité et d’infériorité des gens, des peuples ou même des cultures dans La Vie de voyage, Gobineau exprime par les mots et les réactions de Lucie la vision selon laquelle les cultures ne sont pas miscibles, qu’elles restent irrémédiablement étrangères l’une à l’autre, et même qu’elles sont en définitive impénétrables, qu’il est impossible d’aller au-delà d’un émerveillement de surface. Bien sûr, il parle alors de pays « pour lequel nous sommes faits, et qui est fait pour les natures que nous avons reçues du ciel », mais je ne suis pas sûre d’y voir du racisme, surtout l’idée que l’on ne connait effectivement que la culture dans laquelle on naît.
Une vision très pessimiste et fataliste, d’autant qu’elle vient d’une personne qui s’est frotté à l’autre, à la culture étrangère et a essayé de les comprendre même si ses thèses scientifiques sont souvent fantaisistes. C’est une vision que l’on retrouve aujourd´hui dans beaucoup de discours sur l’immigration, cette idée que les cultures ne peuvent se mêler, pas même souvent cohabiter, ce qui fait de la dernière partie de cette nouvelle un texte relativement actuel, que l’on soit en accord ou non avec ce point de vue.
Entre globalisation d’une certaine culture et immiscibilité, le débat reste entier et la direction que nous prendrons n’est pas encore définie, mais cette nouvelle m’a fait me poser la question de comment je suis moi-même perméable aux autres cultures, de la mesure dans laquelle je comprends les cultures qui me sont étrangères et que j’approche. Je dois avouer que je ne suis pas de celle qui à Rome fait comme les Romains, pas entièrement en tout cas. J’aime préserver un bout de sol français quand je suis au-delà des frontières et je n’ai pas même fait l’effort d’apprendre les langues de certains des pays que j’ai traversés. Je n’ai pas toujours apprécié leurs cultures non plus, même quand elles m’ont intéressée. Suis-je donc une Lucie qui s’ignore, ou bien simplement une personne jonglant tant bien que mal entre ses racines et son environnement, toujours dans un équilibre précaire, de cet équilibre instable qui fait le sel de la vie de voyage ?
  raton-liseur | Jul 24, 2013 |
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