Enfant, j' tais parfois somnambule et me levais en pleine nuit pour faire quelques pas, dans un tat second. Le somnambule a peur de lui-m me, voil ce dont je me souviens. Il est seul, parmi les hommes, vivre par moments son insu. Peut- tre est-ce cela, l'enfer, ou l'une de ses filiales: s' veiller avec le souvenir trouble d'actes qu'on n'avait pas l'intention de commettre. Reprendre contact avec soi-m me dans un taxi, avec, au compteur, des kilom tres dont on ne peut r pondre. Peut- tre est-ce tout simplement la d finition de la vie: un long parcours dans Istanbul dont, le lendemain, on ne garde aucune trace. Qu'est-ce qui d finit une identit ? Des lieux ? Une langue ? Ou plut t une poque, avec ses ciels de tra ne et ses tonalit s bien elle ? Partant d'une tentative d'explication, ric Faye nous emm ne sous des latitudes bor ales, du Groenland la Sib rie, en Europe centrale et sur les lieux d'Hitchcock en Californie, quand ce n'est pas dans les rues d'Istanbul, la poursuite somnambulique d'un sultan rouge d chu, celui-l m me qui avait permis l'ouverture du mur de Berlin, dont il est aussi question ici. De l'Allemagne Nagasaki, de Hiroshima Okinawa, le pass hypnotise celui qui passe, comme si l'identit , au fond, n' tait rien d'autre qu'un peu de temps port sur les paules.