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William McIlvanney (1936–2015)

Auteur de Laidlaw

20+ oeuvres 1,713 utilisateurs 69 critiques 3 Favoris

A propos de l'auteur

William McIlvanney was born in Kilmarnock, Scotland on November 25, 1936. He was educated at Kilmarnock Academy and Glasgow University. He worked as an English teacher and deputy headmaster before retiring in 1975 to become a full time author. His first novel, Remedy Is None, was published in 1966. afficher plus His other novels included A Gift from Nessus, Laidlaw, The Papers of Tony Veitch, Strange Loyalties, and The Kiln. The Big Man was made into a film starring Liam Neeson. He won numerous awards including the Whitbread Prize for Docherty, the Crime Writers' Association's Silver Dagger, the Saltire Award, and the Glasgow Herald People's Prize. He was also a poet, journalist, and broadcaster. He died after a short illness on December 5, 2015 at the age of 79. (Bowker Author Biography) afficher moins

Séries

Œuvres de William McIlvanney

Laidlaw (1977) 552 exemplaires
Les papiers de Tony Veitch (1983) 260 exemplaires
Etranges loyautés (1991) 222 exemplaires
The Dark Remains (2021) 197 exemplaires
Docherty (1975) 151 exemplaires
Big man (1985) 76 exemplaires
The Kiln (1996) 73 exemplaires
Weekend (2006) 69 exemplaires
Walking Wounded (1989) 49 exemplaires
Remedy Is None (1989) 24 exemplaires
A Gift from Nessus (1990) 15 exemplaires
Shades of Grey: Glasgow 1956-1987 (1987) 7 exemplaires
Surviving the Shipwreck (1991) 4 exemplaires
Longships in Harbour (1970) 3 exemplaires
Dreaming Scotland (2014) 1 exemplaire
McIlvanney William 1 exemplaire
Chi si rivede! (2018) 1 exemplaire

Oeuvres associées

The Oxford Book of Scottish Short Stories (1995) — Contributeur — 102 exemplaires

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Critiques

Un peu plus fade que ses autres polars.
 
Signalé
bulgroz | 11 autres critiques | May 26, 2019 |
Les trois volumes sont de facture identique, c'est du très très bon. On n'est pas dans le whodunit avec des enquêtes où l'important est de trouver le meurtrier après un raisonnement très compliqué. On est dans le roman bien noir de chez noir, avec un enquêteur qui descend dans les bas-fonds de Glasgow.

Glasgow est un des personnages principaux de cette trilogie. Il s'agit du Glasgow d'avant et de la réhabilitation de quartier entier. C'est un Glasgow pauvre, ouvrier, où la débrouille règne, où les décisions se prennent dans des pubs, ou il y a des règlements de compte à foison mais on reste tout de même entre gentlemen. Londres est très très loin des préoccupations des habitants ; on ressent le particularisme écossais (ils ne sont pas anglais). William McIlvanney, né dans le Ayrshire, à Kilmarnock, sait de quoi il nous parle en tant que fils de mineur, enseignant à l'Université de Glasgow dans les années 60-70.

L'autre personnage principal, c'est Laidlaw. Un flic pas comme les autres. Il est bien sûr dépressif et alcoolique. Cependant, il a une exigence de vérité (sur les affaires qu'il cherche à résoudre ou même sur la société en elle-même), de refus de l'hypocrisie humaine qui le dépasse lui-même je crois (c'est ce qui à mon avis en fait d'excellents romans noirs. C'est cela pour moi leurs fonctions. Dire ce que la société n'a pas encore vu). Comme on est jamais mieux décrit que par les autres, je vous cite la description de Laidlaw faite par sa femme :

Elle entendit Jack redescendre l'escalier. Un court instant, elle pensa avec nostalgie à la façon dont ils avaient été dans le passé. Mais cette quête intense qui était en lui et qui l'avait d'abord attirée, était également ce qui les avait séparés, parce qu'elle n'avait jamais cessé. Elle avait pensé qu'elle tendait vers quelque chose où elle aurait sa part. Maintenant, elle était convaincue que le plus loin qu'il irait sur cette voie serait le moment où on lui fermerait les yeux. Il fouillait tout jusqu'à la moelle puis passait à autre chose.

Elle l'entendit remonter l'escalier pour se coucher. Chevalier errant de la Brigade Criminelle, pensa-t-elle amèrement. Le problème avec lui, se prit-elle à remarquer, c'est qu'on ne savait jamais si on était la princesse ou le dragon.

Il y a aussi la description de Laidlaw par son nouveau collègue, Brian Harkness que l'on suivra pendant les trois volumes :

La chose la plus frappante chez lui et qu'Harkness avait remarquée chaque fois qu'il l'avait vu, c'était la préoccupation. On ne le trouvait jamais l'esprit vide. On pouvait imaginer que s'il y avait un débarquement sur une île déserte pour le secourir, il aurait quelque chose à terminer avant qu'on l'emmène. Il était difficile de l'imaginer flânant, c'était toujours vers des destinations précises qu'il allait. Harkness se souvint qu'il était l'une d'elles. D'autres infinies possibilités devraient attendre.

Ce qui m'a frappé, c'est que lorsqu'on lit les trois volumes d'affilés, on observe la lente désagrégation de l'intégration sociale de Laidlaw. Dans le premier tome, il est marié, pas très heureux en ménage. Dans le deuxième, il est séparé, vivote avec sa maîtresse. Dans le troisième, il est divorcé, en voie de se séparer de sa maîtresse. Il se sent seul après la mort de son frère, continue à entretenir des relations avec ses connaissances mais il ne va plus laisser personne l'approcher. Il est seul, se détruit lui-même (comme si il en avait déjà trop vu à 40 ans, comme si il était désespéré parce qu'il avait vu). C'est comme si une telle personne ne pouvait pas s'adapter à la société, comme si il fallait forcément abandonner tout ce que l'on pense, faire comme les autres pour pouvoir avoir une petite place dans la vie.

Laidlaw c'est une faculté qu'on reste humain même quand on est un criminel au contraire de ce que l'on peut lire dans les journaux où dès lors que vous avez commis quelque chose, vous ne pouvez plus être humain car sinon cela signifie que tous les humains peuvent faire la même chose. Un dialogue dans le premier tome illustre bien cela :

- Et merde, dit Harkness. C'est sans espoir. Comment doit-on faire des rapprochements avec un truc pareil ? Comment doit-on le relier à ça ?

- Parce qu'il est relié avec nous.

- Parlez pour vous.

-Comment ça ? dit Laidlaw. Vous reniez l'espèce ?

- Non. C'est lui qui l'a reniée.

- Pas aussi simple que ça.

- Pour moi, si.

- Alors, vous êtes un cave. Bientôt vous allez me dire que vous croyez aux monstres. J'ai un gosse de six ans qui a le même problème.

-Vous n'y croyez pas ?

- Si c'était le cas, il faudrait que je croie aux fées. Et je n'y suis pas tout à fait préparé.

- Que voulez-vous dire ?

Laidlaw avait fini de manger. Il but une gorgée de son café.

- Écoutez. Ce que je veux dire, c'est que c'est la fausse noblesse qui fait les monstres. On n'a pas l'une sans l'autre. Pas de fées, pas de monstres. Simplement des gens. Vous savez ce qu'est l'horreur de ce genre de crime ? C'est l'impôt que nous payons pour l'irréalité dans laquelle nous avons choisi de vivre. C'est la peur de nous-mêmes.

Harkness réfléchissait.

- Et alors, qu'est-ce qu'on est là-dedans ?

- Des doublures, dit Laidlaw. Les autres peuvent se permettre de coller l'étiquette "monstre" dessus et de le mettre aux oubliettes. Je suppose que la société ne peut pas faire autrement ou alors, ça ne marcherait pas. Il lui faut faire comme si de telles choses n'étaient pas vraiment le fait des gens. Nous, on ne peut pas se le permettre. On est cette putain de machine urbaine à tête d'homme. C'est-à-dire des policiers.

Harkness remuait gentiment la cassonade avec sa cuiller.

- Allons, dit-il. Allez voir dehors. C'est une belle matinée de printemps. Ces gens qui marchent, là, ce qu'ils font est différent du mode de vie de cet individu.

- Ils se servent d'un langage, dit Laidlaw. Votre mode de vie vous est enseigné comme une langue. C'est de cette façon que vous vous exprimez. Mais tout langage en cache autant qu'il en révèle. Et il y a un tas de langages. Tous sont humains. Le meurtre est un message tout ce qu'il y a d'humain. Mais il est codé. C'est à nous d'essayer de déchiffrer le code. Mais ce que nous recherchons, c'est une partie de nous-mêmes. Si on ne sait pas cela, on ne peut rien entreprendre.

- Excusez-moi s'il y a une parties de nous-mêmes qui me rend malade.

- D'accord, dit Laidlaw. Vous pouvez même pleurer si vous voulez. Ça éclaircit le regard.

À noter, William McIlvanney est considéré comme un des inspirateurs du Tartan noir.

Le style peut dérouter pour deux raisons : il y a beaucoup de dialectes (cela se comprend très bien néanmoins) et il y a des vérités vraies sur la société humaine qui semblent plaquer dans le texte.

Laidlaw se souvint que l'une des choses dont il avait le plus horreur était l'élitisme. Nous faisons partie des autres sous peine de nous renier.

Prises séparément, elles vous mettent une grande claque dans la tête sauf que quand il y en a trop vous ne savez plus trop où vous êtes. C'est un peu pareil pour les images qui arrivent tout d'un coup.

Je n'en ai pas fini avec cet auteur parce qu'il me semble qu'il a encore des choses à me dire.
… (plus d'informations)
 
Signalé
CecileB | 7 autres critiques | Jun 10, 2012 |
Les trois volumes sont de facture identique, c'est du très très bon. On n'est pas dans le whodunit avec des enquêtes où l'important est de trouver le meurtrier après un raisonnement très compliqué. On est dans le roman bien noir de chez noir, avec un enquêteur qui descend dans les bas-fonds de Glasgow.

Glasgow est un des personnages principaux de cette trilogie. Il s'agit du Glasgow d'avant et de la réhabilitation de quartier entier. C'est un Glasgow pauvre, ouvrier, où la débrouille règne, où les décisions se prennent dans des pubs, ou il y a des règlements de compte à foison mais on reste tout de même entre gentlemen. Londres est très très loin des préoccupations des habitants ; on ressent le particularisme écossais (ils ne sont pas anglais). William McIlvanney, né dans le Ayrshire, à Kilmarnock, sait de quoi il nous parle en tant que fils de mineur, enseignant à l'Université de Glasgow dans les années 60-70.

L'autre personnage principal, c'est Laidlaw. Un flic pas comme les autres. Il est bien sûr dépressif et alcoolique. Cependant, il a une exigence de vérité (sur les affaires qu'il cherche à résoudre ou même sur la société en elle-même), de refus de l'hypocrisie humaine qui le dépasse lui-même je crois (c'est ce qui à mon avis en fait d'excellents romans noirs. C'est cela pour moi leurs fonctions. Dire ce que la société n'a pas encore vu). Comme on est jamais mieux décrit que par les autres, je vous cite la description de Laidlaw faite par sa femme :

Elle entendit Jack redescendre l'escalier. Un court instant, elle pensa avec nostalgie à la façon dont ils avaient été dans le passé. Mais cette quête intense qui était en lui et qui l'avait d'abord attirée, était également ce qui les avait séparés, parce qu'elle n'avait jamais cessé. Elle avait pensé qu'elle tendait vers quelque chose où elle aurait sa part. Maintenant, elle était convaincue que le plus loin qu'il irait sur cette voie serait le moment où on lui fermerait les yeux. Il fouillait tout jusqu'à la moelle puis passait à autre chose.

Elle l'entendit remonter l'escalier pour se coucher. Chevalier errant de la Brigade Criminelle, pensa-t-elle amèrement. Le problème avec lui, se prit-elle à remarquer, c'est qu'on ne savait jamais si on était la princesse ou le dragon.

Il y a aussi la description de Laidlaw par son nouveau collègue, Brian Harkness que l'on suivra pendant les trois volumes :

La chose la plus frappante chez lui et qu'Harkness avait remarquée chaque fois qu'il l'avait vu, c'était la préoccupation. On ne le trouvait jamais l'esprit vide. On pouvait imaginer que s'il y avait un débarquement sur une île déserte pour le secourir, il aurait quelque chose à terminer avant qu'on l'emmène. Il était difficile de l'imaginer flânant, c'était toujours vers des destinations précises qu'il allait. Harkness se souvint qu'il était l'une d'elles. D'autres infinies possibilités devraient attendre.

Ce qui m'a frappé, c'est que lorsqu'on lit les trois volumes d'affilés, on observe la lente désagrégation de l'intégration sociale de Laidlaw. Dans le premier tome, il est marié, pas très heureux en ménage. Dans le deuxième, il est séparé, vivote avec sa maîtresse. Dans le troisième, il est divorcé, en voie de se séparer de sa maîtresse. Il se sent seul après la mort de son frère, continue à entretenir des relations avec ses connaissances mais il ne va plus laisser personne l'approcher. Il est seul, se détruit lui-même (comme si il en avait déjà trop vu à 40 ans, comme si il était désespéré parce qu'il avait vu). C'est comme si une telle personne ne pouvait pas s'adapter à la société, comme si il fallait forcément abandonner tout ce que l'on pense, faire comme les autres pour pouvoir avoir une petite place dans la vie.

Laidlaw c'est une faculté qu'on reste humain même quand on est un criminel au contraire de ce que l'on peut lire dans les journaux où dès lors que vous avez commis quelque chose, vous ne pouvez plus être humain car sinon cela signifie que tous les humains peuvent faire la même chose. Un dialogue dans le premier tome illustre bien cela :

- Et merde, dit Harkness. C'est sans espoir. Comment doit-on faire des rapprochements avec un truc pareil ? Comment doit-on le relier à ça ?

- Parce qu'il est relié avec nous.

- Parlez pour vous.

-Comment ça ? dit Laidlaw. Vous reniez l'espèce ?

- Non. C'est lui qui l'a reniée.

- Pas aussi simple que ça.

- Pour moi, si.

- Alors, vous êtes un cave. Bientôt vous allez me dire que vous croyez aux monstres. J'ai un gosse de six ans qui a le même problème.

-Vous n'y croyez pas ?

- Si c'était le cas, il faudrait que je croie aux fées. Et je n'y suis pas tout à fait préparé.

- Que voulez-vous dire ?

Laidlaw avait fini de manger. Il but une gorgée de son café.

- Écoutez. Ce que je veux dire, c'est que c'est la fausse noblesse qui fait les monstres. On n'a pas l'une sans l'autre. Pas de fées, pas de monstres. Simplement des gens. Vous savez ce qu'est l'horreur de ce genre de crime ? C'est l'impôt que nous payons pour l'irréalité dans laquelle nous avons choisi de vivre. C'est la peur de nous-mêmes.

Harkness réfléchissait.

- Et alors, qu'est-ce qu'on est là-dedans ?

- Des doublures, dit Laidlaw. Les autres peuvent se permettre de coller l'étiquette "monstre" dessus et de le mettre aux oubliettes. Je suppose que la société ne peut pas faire autrement ou alors, ça ne marcherait pas. Il lui faut faire comme si de telles choses n'étaient pas vraiment le fait des gens. Nous, on ne peut pas se le permettre. On est cette putain de machine urbaine à tête d'homme. C'est-à-dire des policiers.

Harkness remuait gentiment la cassonade avec sa cuiller.

- Allons, dit-il. Allez voir dehors. C'est une belle matinée de printemps. Ces gens qui marchent, là, ce qu'ils font est différent du mode de vie de cet individu.

- Ils se servent d'un langage, dit Laidlaw. Votre mode de vie vous est enseigné comme une langue. C'est de cette façon que vous vous exprimez. Mais tout langage en cache autant qu'il en révèle. Et il y a un tas de langages. Tous sont humains. Le meurtre est un message tout ce qu'il y a d'humain. Mais il est codé. C'est à nous d'essayer de déchiffrer le code. Mais ce que nous recherchons, c'est une partie de nous-mêmes. Si on ne sait pas cela, on ne peut rien entreprendre.

- Excusez-moi s'il y a une parties de nous-mêmes qui me rend malade.

- D'accord, dit Laidlaw. Vous pouvez même pleurer si vous voulez. Ça éclaircit le regard.

À noter, William McIlvanney est considéré comme un des inspirateurs du Tartan noir.

Le style peut dérouter pour deux raisons : il y a beaucoup de dialectes (cela se comprend très bien néanmoins) et il y a des vérités vraies sur la société humaine qui semblent plaquer dans le texte.

Laidlaw se souvint que l'une des choses dont il avait le plus horreur était l'élitisme. Nous faisons partie des autres sous peine de nous renier.

Prises séparément, elles vous mettent une grande claque dans la tête sauf que quand il y en a trop vous ne savez plus trop où vous êtes. C'est un peu pareil pour les images qui arrivent tout d'un coup.

Je n'en ai pas fini avec cet auteur parce qu'il me semble qu'il a encore des choses à me dire.
… (plus d'informations)
 
Signalé
CecileB | 27 autres critiques | Jun 10, 2012 |
Les trois volumes sont de facture identique, c'est du très très bon. On n'est pas dans le whodunit avec des enquêtes où l'important est de trouver le meurtrier après un raisonnement très compliqué. On est dans le roman bien noir de chez noir, avec un enquêteur qui descend dans les bas-fonds de Glasgow.

Glasgow est un des personnages principaux de cette trilogie. Il s'agit du Glasgow d'avant et de la réhabilitation de quartier entier. C'est un Glasgow pauvre, ouvrier, où la débrouille règne, où les décisions se prennent dans des pubs, ou il y a des règlements de compte à foison mais on reste tout de même entre gentlemen. Londres est très très loin des préoccupations des habitants ; on ressent le particularisme écossais (ils ne sont pas anglais). William McIlvanney, né dans le Ayrshire, à Kilmarnock, sait de quoi il nous parle en tant que fils de mineur, enseignant à l'Université de Glasgow dans les années 60-70.

L'autre personnage principal, c'est Laidlaw. Un flic pas comme les autres. Il est bien sûr dépressif et alcoolique. Cependant, il a une exigence de vérité (sur les affaires qu'il cherche à résoudre ou même sur la société en elle-même), de refus de l'hypocrisie humaine qui le dépasse lui-même je crois (c'est ce qui à mon avis en fait d'excellents romans noirs. C'est cela pour moi leurs fonctions. Dire ce que la société n'a pas encore vu). Comme on est jamais mieux décrit que par les autres, je vous cite la description de Laidlaw faite par sa femme :

Elle entendit Jack redescendre l'escalier. Un court instant, elle pensa avec nostalgie à la façon dont ils avaient été dans le passé. Mais cette quête intense qui était en lui et qui l'avait d'abord attirée, était également ce qui les avait séparés, parce qu'elle n'avait jamais cessé. Elle avait pensé qu'elle tendait vers quelque chose où elle aurait sa part. Maintenant, elle était convaincue que le plus loin qu'il irait sur cette voie serait le moment où on lui fermerait les yeux. Il fouillait tout jusqu'à la moelle puis passait à autre chose.

Elle l'entendit remonter l'escalier pour se coucher. Chevalier errant de la Brigade Criminelle, pensa-t-elle amèrement. Le problème avec lui, se prit-elle à remarquer, c'est qu'on ne savait jamais si on était la princesse ou le dragon.

Il y a aussi la description de Laidlaw par son nouveau collègue, Brian Harkness que l'on suivra pendant les trois volumes :

La chose la plus frappante chez lui et qu'Harkness avait remarquée chaque fois qu'il l'avait vu, c'était la préoccupation. On ne le trouvait jamais l'esprit vide. On pouvait imaginer que s'il y avait un débarquement sur une île déserte pour le secourir, il aurait quelque chose à terminer avant qu'on l'emmène. Il était difficile de l'imaginer flânant, c'était toujours vers des destinations précises qu'il allait. Harkness se souvint qu'il était l'une d'elles. D'autres infinies possibilités devraient attendre.

Ce qui m'a frappé, c'est que lorsqu'on lit les trois volumes d'affilés, on observe la lente désagrégation de l'intégration sociale de Laidlaw. Dans le premier tome, il est marié, pas très heureux en ménage. Dans le deuxième, il est séparé, vivote avec sa maîtresse. Dans le troisième, il est divorcé, en voie de se séparer de sa maîtresse. Il se sent seul après la mort de son frère, continue à entretenir des relations avec ses connaissances mais il ne va plus laisser personne l'approcher. Il est seul, se détruit lui-même (comme si il en avait déjà trop vu à 40 ans, comme si il était désespéré parce qu'il avait vu). C'est comme si une telle personne ne pouvait pas s'adapter à la société, comme si il fallait forcément abandonner tout ce que l'on pense, faire comme les autres pour pouvoir avoir une petite place dans la vie.

Laidlaw c'est une faculté qu'on reste humain même quand on est un criminel au contraire de ce que l'on peut lire dans les journaux où dès lors que vous avez commis quelque chose, vous ne pouvez plus être humain car sinon cela signifie que tous les humains peuvent faire la même chose. Un dialogue dans le premier tome illustre bien cela :

- Et merde, dit Harkness. C'est sans espoir. Comment doit-on faire des rapprochements avec un truc pareil ? Comment doit-on le relier à ça ?

- Parce qu'il est relié avec nous.

- Parlez pour vous.

-Comment ça ? dit Laidlaw. Vous reniez l'espèce ?

- Non. C'est lui qui l'a reniée.

- Pas aussi simple que ça.

- Pour moi, si.

- Alors, vous êtes un cave. Bientôt vous allez me dire que vous croyez aux monstres. J'ai un gosse de six ans qui a le même problème.

-Vous n'y croyez pas ?

- Si c'était le cas, il faudrait que je croie aux fées. Et je n'y suis pas tout à fait préparé.

- Que voulez-vous dire ?

Laidlaw avait fini de manger. Il but une gorgée de son café.

- Écoutez. Ce que je veux dire, c'est que c'est la fausse noblesse qui fait les monstres. On n'a pas l'une sans l'autre. Pas de fées, pas de monstres. Simplement des gens. Vous savez ce qu'est l'horreur de ce genre de crime ? C'est l'impôt que nous payons pour l'irréalité dans laquelle nous avons choisi de vivre. C'est la peur de nous-mêmes.

Harkness réfléchissait.

- Et alors, qu'est-ce qu'on est là-dedans ?

- Des doublures, dit Laidlaw. Les autres peuvent se permettre de coller l'étiquette "monstre" dessus et de le mettre aux oubliettes. Je suppose que la société ne peut pas faire autrement ou alors, ça ne marcherait pas. Il lui faut faire comme si de telles choses n'étaient pas vraiment le fait des gens. Nous, on ne peut pas se le permettre. On est cette putain de machine urbaine à tête d'homme. C'est-à-dire des policiers.

Harkness remuait gentiment la cassonade avec sa cuiller.

- Allons, dit-il. Allez voir dehors. C'est une belle matinée de printemps. Ces gens qui marchent, là, ce qu'ils font est différent du mode de vie de cet individu.

- Ils se servent d'un langage, dit Laidlaw. Votre mode de vie vous est enseigné comme une langue. C'est de cette façon que vous vous exprimez. Mais tout langage en cache autant qu'il en révèle. Et il y a un tas de langages. Tous sont humains. Le meurtre est un message tout ce qu'il y a d'humain. Mais il est codé. C'est à nous d'essayer de déchiffrer le code. Mais ce que nous recherchons, c'est une partie de nous-mêmes. Si on ne sait pas cela, on ne peut rien entreprendre.

- Excusez-moi s'il y a une parties de nous-mêmes qui me rend malade.

- D'accord, dit Laidlaw. Vous pouvez même pleurer si vous voulez. Ça éclaircit le regard.

À noter, William McIlvanney est considéré comme un des inspirateurs du Tartan noir.

Le style peut dérouter pour deux raisons : il y a beaucoup de dialectes (cela se comprend très bien néanmoins) et il y a des vérités vraies sur la société humaine qui semblent plaquer dans le texte.

Laidlaw se souvint que l'une des choses dont il avait le plus horreur était l'élitisme. Nous faisons partie des autres sous peine de nous renier.

Prises séparément, elles vous mettent une grande claque dans la tête sauf que quand il y en a trop vous ne savez plus trop où vous êtes. C'est un peu pareil pour les images qui arrivent tout d'un coup.

Je n'en ai pas fini avec cet auteur parce qu'il me semble qu'il a encore des choses à me dire.
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CecileB | 11 autres critiques | Jun 10, 2012 |

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