Stephen Frears

Stephen Frears revisite assez habilement l'histoire de Docteur Jekyll et Mister Hyde, dévoilant l'âpreté et la soif du mal dissimulée au fond de tout être humain. Assez habilement car il met en scène et donne priorité à un personnage féminin -Mary Reilly, assez remarquablement interprétée par Julia Roberts, bien loin des interprétations gnangnan qu'elle a pu donner dans Pretty Woman ou Coup de foudre à Notting Hill- hantée par un passé très douloureux, marqué par un père violent, ivrogne, incontrôlable et pervers. Ces failles liées à un traumatisme d'enfance, racontées au docteur Jekyll dont Marie est la servante, permettront à Mister Hyde, versant totalement obscur du docteur Jekyll d'explorer et de tester -non sans cruauté- les abysses mentales de la jeune femme.

L'intérêt premier du film réside dans le trouble ressenti par cette jeune servante, tiraillée entre le sentiment amoureux qu'elle éprouve pour le docteur "prévenant" et ambigu et la terreur que lui inspire de plus en plus la maison, précédemment un lieu où elle avait enfin trouvé la sécurité. Ce trouble sera porté à son comble quand elle fait la rencontre de Mister Hyde, présenté comme l'assistant du "bon" docteur. Elle a beau craindre le mal qu'il incarne, elle ne peut s'empêcher de se détourner de la flamme qui peut la brûler, elle qui a dû côtoyer le mal et subi les pires sévices dans son enfance.

Ainsi, cette relecture de l'histoire de Stevenson met moins l'accent sur la dualité du bien et du mal chez l'homme que sur la fascination que cette dernière exerce sur l'autre.

Il fallait une actrice douée d'une grande gamme d'expressions pour restituer autant de sentiments contradictoires et ambigus; Julia Roberts s'en acquitte à merveille, dans la seule force de son regard. John Malkovich est bon, comme toujours, même si en comparaison, son jeu s'avère moins ample et moins subtil. Il réside toujours en lui un peu du Comte de Valmont qui se frotte à d'autres personnages.… (plus d'informations)